Communiqué adressé au Petit Bleu, en réponse à l’article paru le 7 mars, intitulé Côtes d'Armor : « L'éleveur de porcs de Plouasne, près de Dinan, se défend face aux manifestants » Réponse à M. Dartois
M. Laurent Dartois défend son projet agro-industriel à Plouasne en jugeant que c’est parce qu’il est mal connu, mal compris, qu’il est contesté. Bien au contraire. Son projet d’usine à viande dans un bâtiment de 6434 m² concentre toutes les tares désormais bien connues d’un modèle agricole destructeur de l’environnement et dangereux pour la santé humaine. Disons tout d’abord qu’il ne s’agit pas d’une
extension mais de la régularisation d’un élevage qui faisait l’objet depuis 2017 d’un arrêté préfectoral de mise en demeure de se mettre aux normes par rapport à ses excédents azotés.
Par ses achats fonciers successifs (4 grosses exploitations au total), M. Dartois accapare des terres en empêchant les jeunes de s’installer alors que les départs en retraite sont très nombreux. Il se vante ainsi de créer de l’emploi salarié (dont la pénibilité n’attire guère), en oubliant les emplois indépendants qu’il condamne.
Avec l’objectif constant depuis 60 ans de produire toujours plus, les cultures sont massivement dopées aux engrais de synthèse (azote surtout, mais aussi phosphate et potasse)*. Ainsi fragilisées face aux maladies, les monocultures sont arrosées préventivement d’insecticides, de fongicides et d’herbicides qui ont fait disparaître les 3/4 des insectes volants en 25 ans, provoquant désormais une crise de la pollinisation**.
Parce que tout ceci ne suffit pas à nourrir une population animale pléthorique (plus de 3000 porcs au km2 dans certaines communes, sans compter les volailles et bovins), il faut importer des millions de tonnes de matières riches en protéines d’Amérique latine, au prix de la déforestation là-bas. Pour ces protéagineux destinés aux animaux, la Bretagne dépend de l’import à 95 %
M. Dartois qui se vante de produire en partie pour l’exportation en Chine, en Afrique et ailleurs, est en réalité très dépendant des importations de gaz russe pour la production des ammonitrates, du phosphate
venant du Maroc (pollué au cadmium), des semences et des pesticides produits par des multinationales comme Monsanto-Bayer, du soja OGM brésilien ou argentin quand ce n’est pas du maïs arrivant par les
ports bretons. La « souveraineté alimentaire » ne consiste pas à prétendre nourrir le monde mais bien à être autonome.
Quand M. Dartois clame le 20 février à Plouasne, « Nous ne sommes pas des assistés, nous vivons bien de notre travail », il oublie un peu vite que les agriculteurs français reçoivent chaque année de la PAC 10 milliards € d’aides.
Il oublie aussi que les pollueurs ne sont pas les payeurs. Les agriculteurs ne payent ni pour le Plan Algues Vertes, ni pour la potabilisation de l’eau contaminée aux nitrates et aux pesticides, ni pour la pollution de l’air aux particules fines issues de l’ammoniac, ni pour les malades de l’environnement de plus en plus nombreux (cancer, alzheimer etc...). Aux ravages des pesticides et de leurs métabolites, vient désormais s’ajouter le risque de pandémies à partir de zoonoses (maladies se transmettant de l’animal à l’humain) car 90 % des agents pathogènes recensés en 2014 étaient inconnus dans la décennie 90 et que 75 % des maladies animales émergentes peuvent contaminer l’homme. Dans ces élevages où sont entassés un grand nombre d’animaux stressés et fragilisés, d’une très faible diversité génétique, l’apparition d’un virus aurait l’effet d’une allumette tombant dans un baril de poudre. Des scientifiques ont lancé l’alerte le 15 janvier dernier, en demandant la sortie de l’élevage intensif pour échapper aux pandémies.***
Halte Aux Marées Vertes - La France Insoumise Côtes d’Armor
15 mars 2021
* « Les apprentis sorciers de l’azote La face cachée des engrais chimiques », Claude Aubert, préface de Hervé Kempf, Ed ition Terre vivante, 140 p., janvier 2021.
** « Et le monde devint silencieux Comment l’agrochimie a détruit les insectes » Stéphane Foucart, Edition du Seuil, 325 p., août 2019. (chiffres cités à retrouver en page 37).
*** « La fabrique des pandémies Préserver la biodiversité, un impératif planétaire », Marie-Monique Robin, avec la collaboration de Serge Morand, Edition La Découverte, 338 p., 2021.
Com presse hamv fi petitbleu mars 2021